Je vous propose aujourd’hui l’interview d’Alain, un ami « investisseur en bourse à temps plein » et accessoirement auteur du tout jeune blog parlons-cash.fr
investir en bourse
Salut Alain, c’est un plaisir de te recevoir ici… Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Après un petit tour en faculté de droit, sans grand succès, j’ai repris ma première boîte à l’âge de 19 ans sans aucune expérience, financé par un modeste apport personnel (20k€), un crédit pro et la caution personnelle de ma mère. C’était un commerce de détail, une petite affaire saine et rentable dont j’ai flairé le potentiel de développement, notamment par internet. Je me suis investi à fond dans le projet, j’ai essayé de m’entourer des bonnes personnes, l’affaire s’est bien développée et j’ai ouvert deux établissements secondaires, puis repris un troisième en location-gérance.
Après 8 ans d’activité intense, dégoûté par la pression dont sont victimes les entrepreneurs en France, j’ai cédé toutes mes participations à des repreneurs qui exercent encore aujourd’hui. Peu après, lorsque j’ai fait appel à des banques françaises pour financer des biens immobiliers, je n’ai essuyé que des refus compte tenu de ma situation, ou on me proposait des montages avec 50% d’apport + frais de notaire + hypothèque. Sans trop y croire, je suis allé consulter des banques luxembourgeoises qui m’ont fait des propositions beaucoup plus intéressantes.
Aujourd’hui j’ai 29 ans, je suis célibataire, j’habite à Luxembourg et depuis bientôt 3 ans, je me consacre exclusivement à la gestion de mon patrimoine et à mon éducation financière.
Tu as atteint (très rapidement) l’objectif que de nombreuses personnes (moi y compris) se sont fixées : devenir rentier (avant la retraite, j’entends !). Peux-tu nous raconter comment se passent tes journées ?
J’ai toujours un peu de mal avec le mot « rentier », ça me fait penser à quelqu’un d’oisif, de privilégié, d’arrogant : je trouve l’image assez péjorative. De mon côté c’est plutôt jean, basket, et franc-parler. Passé un certain niveau, si l’on veut se passer des intermédiaires et optimiser son rendement, la gestion de son patrimoine est un vrai travail qui demande un niveau élevé de connaissances en matière financière, fiscale, et bancaire. L’acquisition de ces connaissances se fait sur plusieurs années ; dans mon cas je me suis « auto-formé » principalement grâce à la lecture des ouvrages de référence en la matière, mais aussi de manière moins académique grâce à mes rencontres et la lecture de blogs et forums.
Pour répondre à ta question (je ne vais pas me faire que des amis), ma journée type commence par un réveil naturel, vers 9-10 heures, suivi d’un petit déjeuner équilibré que je prends en lisant les infos boursières du matin. Ensuite, j’ai souvent un peu de travail administratif, des mails ou du téléphone. Après le déjeuner, soit j’ai des RDV à l’extérieur (je n’en prends jamais le matin), soit je vais me balader dans les alentours ; si la météo est mauvaise je bouquine un peu de littérature financière, des analyses de marché, ou des livres d’histoire de l’art. En fin d’après-midi, je guette les mouvements à l’ouverture de Wall Street avant de filer 1h30 en salle de sport, ce qui me laisse le temps de réfléchir à une éventuelle transaction pendant que je brûle mes calories. Le soir, je reçois souvent, mais dans tous les cas je prends 10 minutes avant d’aller me coucher pour faire le point sur la clôture de Wall Street. Je profite de ma liberté pour voyager un maximum, cette année j’étais en Inde, à la Réunion, à Malte, en Espagne, à Amsterdam, j’ai passé une partie de l’été dans le Sud, et je compte me faire un périple en Amérique Centrale d’ici la fin de l’année. Quand tu peux voyager hors-saison, c’est beaucoup plus agréable et bien moins cher ! J’aimerais aussi participer à la vie associative ici à Luxembourg, je suis en train de me renseigner sur le sujet.
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Pourquoi avoir choisi de te tourner vers la bourse plutôt que vers l’immobilier ?
Comme je l’explique dans le premier article de mon blog, je m’étais constitué un petit parc d’immobilier physique à l’époque où j’avais mes entreprises. Avec le recul, je m’y étais assez mal pris (j’ai surtout investi dans des apparts situés dans des grosses copropriétés) mais j’ai aussi été assez malchanceux vis-à-vis de mes locataires : un certain nombre d’entre eux avait à l’origine une situation saine qui s’est dégradée en même temps que leur régularité dans le paiement des loyers. J’ai aussi fait les frais de nombreux travaux de copropriété, notamment la mise en conformité des ascenseurs, qui ont largement amputé mon rendement. J’ai liquidé tous mes appartements un à un et malgré la hausse du marché sur les dernières années, je ne crois pas avoir réalisé le moindre profit, les remboursements de capital couvrant à peine les frais engagés et la fiscalité.
En parallèle, la valeur de mon portefeuille d’actions ne faisait qu’augmenter, et le rendement net après impôts de celui-ci était largement meilleur que celui de mes biens. D’autant plus que je n’avais pas besoin de réclamer de loyer (les dividendes tombent tous les 3 mois), j’achète et je vends plusieurs dizaines de milliers d’euros d’actions en un clic, sans frais de notaire, les plus-values sont exonérées d’impôt dans le cadre du PEA ou bénéficient d’un abattement de 50% après 2 ans de détention sur un compte-titres, et les dividendes bénéficient de 40% d’abattement. En ce qui me concerne le choix était vite fait.
Ce qu’il faut savoir, c’est que l’immobilier et la bourse ne sont pas forcément incompatibles. Tu peux acheter des actions de grosses sociétés d’investissement en immobilier (SIIC) qui sont cotées en bourse : en Europe, Unibail-Rodamco est la plus connue, mais il y a aussi Klepierre, Mercialys (qui détient notamment les murs des galeries marchandes Géant-Casino), Immobilière Dassault possède des biens d’exception sur Paris, Vonovia et Deutsche Wohnen sont mes deux préférées en Allemagne.
Aux Etats-Unis (c’est mon marché de prédilection), les possibilités sont encore plus nombreuses : tu peux investir dans des murs de centres commerciaux, du résidentiel, des bureaux, des hôtels, des cliniques, des maisons de retraite, des centres de données, des boxes de stockage, des entrepôts, des terrains agricoles, des antennes de télécommunication, et même des prisons !
Concrètement, ça se passe comme ça : tu ouvres un compte-titres auprès de ta banque ou d’un courtier en ligne, et d’un seul clic et sans frais de notaires, tu achètes des actions, c’est-à-dire une toute petite partie d’une société d’investissement immobilier. Comme tu deviens actionnaire, tu as donc le droit à cette même toute petite partie des loyers nets, qui te sont versés en cash directement sur ton compte-titres. Tu peux aller dépenser tes dividendes, ou les réinvestir pour en toucher plus. Certaines entreprises payent mensuellement, d’autres au trimestre ou à l’année. Même si je ne le recommande pas forcément, tu peux aussi utiliser l’effet de levier pour acheter à crédit.
L’une des différences avec l’immobilier physique, c’est la volatilité des cours. Chaque jour, les prix des actions changent, et certaines personnes ne le supportent pas. C’est comme si tous les matins, quelqu’un venait toquer à ta porte et te proposait un prix différent pour ton immeuble d’investissement, parfois très haut, parfois très bas. Si un matin, il te proposait la moitié de ce que tu l’as payé, mais que tu génères toujours les mêmes loyers, est-ce que tu le lui vendrais ? Probablement pas. Et bien figure toi que beaucoup de gens font l’inverse avec leurs actions !
Mais je n’ai pas jeté l’éponge avec l’immobilier pour autant. Aujourd’hui, je n’en possède plus, ce qui est une aberration d’un point de vue patrimonial. Comme je l’expliquais dans ma présentation, je cherche à y remédier en faisant des acquisitions, ce qui était impossible en France compte tenu de l’absence de revenus fixe, mais qui est tout à fait possible ici à Luxembourg. Les conditions de financement sont beaucoup plus souples dans ma situation, mais aussi (et surtout) les mauvais payeurs sont moins bien protégés et… il n’y a pas de CSG et la taxe foncière est quasi nulle !
Tu te considères comme « investisseur » en bourse, pourtant l’expression populaire est plutôt « jouer » en bourse. Quelle est selon toi la différence entre les 2 ?[...] Lire la suite